Un nom de lieu de la Guerre des Gaules : Limeray

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Le nom de lieu « Limeray » est toujours resté énigmatique jusqu’à cette étude approfondie des toponymes de cette commune.

Cultivons-nous un peu, et examinons l’évolution de la science sur cette question…

Le cœur du bourg de Limeray (Indre-et-Loire)

Le cœur du bourg de Limeray (Indre-et-Loire)

Limeray est un bourg connu pour ces viticulteurs, l’étude de son nom peut nous donner sans doute la datation de l’implantation de l’exploitation des plantations de vignes par les envahisseurs romains qui, avant la Guerre des Gaules, vendaient à la population locale le divin breuvage pour « adoucir » les moeurs de leurs ennemis gaulois (comme font certains aujourd’hui avec la pornographie, les écrans, ou certaines autres drogues…), pour mieux, cela va sans dire, s’approprier leurs savoirs-faire et leurs richesses.

En effet, ces mêmes Romains exterminèrent la population gauloise carnute voisine de Limeray, pour s’approprier la production du blé de la Beauce. Les traces de cette tuerie ont profondément marqué le paysage.

« Buvez-en tous ; car ceci est mon sang, le sang de l’alliance, qui est répandu pour beaucoup, pour le pardon des péchés  » trouve-t-on écrit dans le livre le plus populaire au monde (Mat. 26 : 26-28.).

Limeray est sur cette limite, cette frontière entre l’ancien pays des Carnutes massacrés, et l’ancien pays des Turons, l’actuelle Touraine, dont l’aristocratie gauloise et ses chevaliers semblent avoir collaboré (sous la menace ?) avec l’occupant pour le commerce (esclaves, denrées, etc…).

La fondation de la ville de Tours par César (sans doute Auguste et non Jules) est le résultat de cette collaboration, qui romanisa cette région d’une toute autre manière…

Que nous disent les « savants » qui se sont penchés sur cette question. Que veut dire Limeray ? Pour le savoir, consultez cette article portant sur les anciennes interprétations du nom Limeray.

Limeray, un nom des légions romaines sur un ancien nom gaulois...

Limeray, un nom des légions romaines sur un ancien nom gaulois…

Nous pensons qu’il faut aller plus loin…

Si nous entamons une étude comparative, nous devons prendre en compte les autres toponymes Limeray, semblables ou proches de celui qui nous intéresse. Ainsi nous trouvons :
– Limeray, sur la commune d’Azé (Loir-et-Cher),
– Limeray, sur la commune de Charnizay (Indre-et-Loire),
– Le Haut et le Bas Limeray, sur la commune de Verneuil-sur-Indre (Indre-et-Loire).

Le suffixe –ay de Limeray se trouve sous la forme de –ac dans le sud de la France. Ainsi nous trouvons :
– Limérac, sur la commune de Marthon (Charente),
– Limérac, sur la commune de Salles-Lavalette (Charente).

Pour compléter cette recherche, ajoutons :
– Lémerie, sur la commune de Rougnac (Charente),
– Lémerie, sur la commune de Gurat (Charente),
– Les Landes de Lémerie, sur la commune de Langeais (Indre-et-Loire),
– La Lèmerie, sur la commune du Grand-Pressigny (Indre-et-Loire).

La commune de Léméré (Indre-et-Loire), semble un peu à part dans cet inventaire.

Limeray et Limérac, en France, traces des légions romaines de Jules César

Limeray et Limérac, en France, traces des légions romaines de Jules César

Observons ces toponymes à la loupe…

Gros plan sur l'implantation des légions romaines en 51-50 av. J. C.

Gros plan sur l’implantation des légions romaines en 51-50 av. J. C.

Le premier constat est que les quatre Limeray présents sur le territoire français sont alignés sur une ligne nord-sud sur la limite entre les Carnutes et les Turons, ou entre les Carnutes et les Cénomans, et entre les Turons et les Bituriges. Ceci correspond parfaitement au récit de Jules César dans la Guerre des Gaules, quant au placement, dans l’hiver 51 à 50 avant Jésus Christ, après la bataille d’Alésia, de deux légions « chez les Turons, sur la frontière des Carnutes, pour contenir toutes les contrées qui touchent l’océan ».

Il est fort improbable d’y voir l’installation quatre fois et seulement ici d’un germain nommé Litmar ou Liutmar, selon les anciennes interprétations de ce toponyme. Ce serait vraiment une curiosité historique.

Nous devons noter que Limeray de la commune d’Azé, se situe à l’ouest de la forêt de Vendôme entre une vallée assez rectiligne et la forêt séparant le Perche de la Beauce romanisée.

Limeray de Charnizay, se trouve au nord d’une forêt formant la frontière du pays turon avec les Bituriges et au bout d’une vallée profonde formant la frontière entre la Touraine et le Berry, entre Charnizay et Obterre.

Cette frontière est également marquée par la Lèmerie, sur la commune du Grand-Pressigny, au nord d’une autre forêt.

Limeray de Verneuil-sur-Indre se situe au croisement d’une faille géologique et d’une vallée rectiligne secondaire donnant sur la vallée de l’Indre non loin de la frontière avec les Bituriges.

Le Haut et le Bas Limeray de la commune de Verneuil-sur-Indre se situent entre une forêt et la vallée de l’Indre.

Signalons, et sans doute pas seulement anecdotiquement, que le lieu-dit du Château de Limeux (27 ; Eure), un des trois toponymes français Limeux, se situe sur cette ligne nord-sud. Un autre, évoquant sans doute des ormes est visitable dans le département du Cher, non loin de Reuilly, et un autre est visitable dans le département de la Somme.

Dans le département de la Charente, les deux Limérac sont à associer aux deux Lémerie, et, se trouvent tous les quatre alignés sur la frontière du département. Nous pensons qu’il faut y voir sans doute également là une implantation des légions romaines pour contenir les peuples de l’ouest, mais aussi les Arvernes, plus à l’Est. Jules César, dans les Commentaires sur la Guerre des Gaules nous indique qu’il plaça « deux autres (légions) chez les Lémovices, non loin des Arvernes, pour ne laisser sans armée aucune partie de la Gaule« .

Les Landes de Lémerie sur la commune de Langeais et Léméré peuvent peut-être, mais avec moins de probabilité, être associés à une frontière défensive placée par Jules César.

Nous avons là une très forte probabilité que le Limeray qui nous intéresse ait été un toponyme de frontière lié à l’implantation des légions romaines de Jules César à la fin de la Guerre des Gaules, vers 51 ou 50 avant Jésus Christ.

Pour avoir fait l’étude de la commune de Cangey voisine, j’ai pu y constater la présence de ces légions : les toponymes de légionnaires, de camps fortifiés romains, de commandement romain, des fossés multiples creusés et répartis sur une ligne nord-nord-ouest, sud-sud-est, etc.

Limeray paraît la limite, entre la zone carnute totalement dépeuplée et romanisée et le pays turon. La linguistique peut-elle nous éclairer à ce sujet ?

La forme leme n’existe pas en latin, mais la forme limes existe. Il nous ouvre sur la famille des mots limen, liminis (porte, entrée, début, commencement, ou fin, achèvement), limenarcha (inspecteur de port), Limentinus (dieu qui veillait au seuil des portes), limes, limitis (sentier, passage entre deux champs, bordure, limite, frontière), liminaris, liminare (relatif au seuil, liminaire, initial), limis, lime (qui regarde de travers), limitalis, limitale, ou limitaneus (placé aux frontières, qui garde les frontières), limitaris (relatif aux limites), limitamentum (action de délimiter), limitatio, limitationis (bordage, délimitation), limitator, limitatoris (arpenteur), limito, limitare (entourer de frontières, limiter)…

Le limes était la frontière fortifiée entre l’empire romain et les barbares germains.

Nous pensons que cette piste ne doit pas être lâchée en considérant la répartition des toponymes semblables à Limeray ou qui semblent de la même famille en France.

Notre conclusion sera celle-ci : au regard de la répartition des Limeray en France et des Limérac et Lémerie, nous pensons que Limeray est un toponyme de frontière, de limite, de seuil entre deux zones. Son origine est sans doute romaine et liée à la fin de la Guerre des Gaules.

Il faut sans doute comprendre Limeray comme lime (limite, frontière) et ray, qui faut comprendre comme une raie, une ligne, un sillon.

Le mot raie est un dérivé du gaulois rica. On le trouve en gallois, rhych, et en irlandais, rech. Il donnera en bas latin riga. Cette raie est sans doute la Rue d’Enfer qui définit le bourg de Limeray, cette percée géologique dans le coteau de la Loire, en même temps, limite, frontière, bien comprise et utilisée comme telle par les Romains, et en même temps raie, sillon.

Géologie-Toponyme-Limeray

La raie dans le coteau dans la géologie de la frontière à Limeray

Ce mot « ray » était même peut-être l’ancien nom gaulois du lieu. Ce ne sera pas la première fois que l’on constatera l’association d’un mot gaulois et d’un mot romain dans la construction d’un toponyme gallo-romain.

Limeray serait, la raie de la limite, la ligne, le sillon du seuil, frontière entre le pays totalement romanisé à l’Est et le pays à romaniser à l’Ouest.

La notion de frontière est présente dans les quatre Limeray de la Région. La notion de raie, de sillon, semble aussi l’être : vallée rectiligne, faille géologique. Cela est particulièrement visible à Verneuil-sur-Indre.

Pour aller beaucoup plus loin dans la connaissance de Limeray, en Touraine, plongez-vous dans cette étude approfondie des toponymes de cette commune.

C’est donc en cet hiver 51-50 avant Jésus Christ que des hommes du Sud, notamment de la Narbonnaise ou d’Italie, pays à l’époque viticole, introduisirent leur culture de la viticulture en limite de la Touraine, avec notamment le culte de Saturne.

Vignette-devinette v3

Vignettes-devinettes…

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