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Un clin d’œil à l’animation-conférence du vendredi 20 avril 2018, à 20 h 30 à la salle Nozilia de Nouzilly…
Incroyable et merveilleux, Nouzilly, ses randonnées, ses mégalithes, ses noms gaulois et romains, ses fossés de César, ses mines gauloises, romaines, franques, ses étangs, ses ruisseaux, ses marais, son clocher incontournable… et son mystérieux nom, NOUZILLY, ici dévoilé…
Les anciennes interprétations
Les anciennes interprétations des années 60 (Ernest Nègre ; Albert Dauzat et Charles Rostaing), indiquant que Nouzilly proviendrait d’un nom de domaine gallo-romain provenant d’un nom d’homme latin Nucilius, ou proviendrait du latin nux, la noix, avec le suffixe –acum, furent reprises par la “littérature” de supermarché (Jean-Marc Pesson et Jean-Marie Cassagne), et furent également reprises par les spécialistes actuellement en vogue (Stéphane Gendron…).
Une enquête de terrain s’impose…
Description géomorphologique, aperçu paysagé !
Inséré au milieu de quatre rûs, petits ruisseaux, qui mouillent la Petite Choisille, Nouzilly apparaît comme une petite hauteur entre deux vallons fusionnant à l’Etang de la base de loisirs. Ces deux vallons, enserrant le cœur du village, sont eux-mêmes alimentés par deux autres petits vallons provenant du plateau nord de la commune, où pousse le Bois de Nouzilly. L’un des vallons touche à Nouzilly à Belle Fontaine et l’autre au Gué Chapelle.
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Nouzilly se trouvent donc entre d’anciens marécages transformés en étangs par la levée de chaussées ou assainis par de profonds fossés. Ces anciens marécages sont encore bien perceptibles à l’Etang de la base de loisirs et en aval vers le sud.
Terminologie gauloise géomorphologique : “noues”
Les marécages, terres humides, se disent en gaulois, langue celtique, nauda. Ce terme a donné le mot paysan de terroir, noue.
Ce terme paysan gaulois se rencontre surtout en Sologne, dans la vallée de la Loire, au sein du Perche et de la Gâtine.
Considérant la configuration géomorphologique de Nouzilly, il est raisonnable de penser que la première syllabe de Nouzilly est ce mot “noue” en question.
L’Etang de la Base de Loisirs avec ces levées, les profonds fossés qui y drainent l’eau du plateau et les eaux de pluies, sont des aménagements de lutte contre ces marécages qui présentaient autrefois un caractère défensif et protecteur certain.
Le second Nouzilly de France, sur la commune de Chalais dans le département de la Vienne, se situe auprès d’un hameau nommé Nouère, toponyme signifiant « qui a le caractère de la noue »…
Le calcaire aux rognons de silex des hauteurs des environs du bourg
Le relief calcaire des hauteurs de la commune et de son bourg, ancien dépôt marin, aspire par capillarité toute cette humidité qui pénètre également par gravité suite aux intempéries.
Cette humidité porte les minéraux dissous des sables du limon des plateaux de surface (sables éoliens sahariens), créant dans la craie, dépôt marin coquillé, des poches de silex appelés “rognons de silex” par dissolution de ce calcaire poreux.
Une fois totalement dissous, le calcaire laisse alors de l’argile à silex, très présent sur l’étendue de la commune.
Ces rognons de silex ressemblent souvent à des os car ils sont recouverts d’une fine couche blanche.
Terminologie gauloise géomorphologique : le suffixe -illy
Le suffixe –ille est considéré comme un diminutif féminin : brin, brindille ; barbe, barbille ; rameau, ramille ; pendre, pendiller ; saut, sautiller ; mordre, mordiller ; etc.
Le suffixe gaulois –illy, est connu à travers le terme gaulois –ialo, clairière, par le terme celtique gallois –il, qui signifie fermentation, et par le latin –ilia, qui désigne les hanches, les flancs, le ventre, les entrailles, terme ayant donné en français “iliaque” (os iliaques du bassin qui supportent surtout les intestins).
On peut penser que ces trois définitions, la clairière, la fermentation et les hanches, n’ont aucun rapport, mais il faut considérer qu’un marais, une zone humide, ne présente pas de grands arbres et que c’est donc une zone non boisée, à la vue dégagée, un panorama représenté habituellement par le suffixe gaulois –euil.
Un marécage est également une zone de fermentation, pouvant même générer des feux follets, des odeurs nauséeuses, voire du méthane, c’est-à-dire du gaz inflammable, également produit par notre fermentation intestinale : les pets… Cette fermentation est essentiellement due au pourrissement de la matière organique de cette habitat naturel animal et végétal.
Le rapport avec les hanches et les entrailles devient alors tout à fait évident.
La géomorphologie des environs du bourg de Nouzilly est d’ailleurs particulièrement illustrative à ce propos puisque la configuration hydrographique ressemble effectivement à des hanches.
Cette fermentation inflammable des marais des environs de Nouzilly est documentée dans les sources anciennes des Archives départementales où on trouve nombre de documents des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles, portant sur de fréquents incendies des forêts de la paroisse (série H de l’abbaye de Saint-Julien de Tours, dont dépendait le prieuré Saint-André de Nouzilly).
Le suffixe –illy, avec les Nantilly, les Neuilly, etc.
Le suffixe –illy est évidemment associé à la présence de l’eau, de marais, de vallées. Le terme gaulois nant-, signifiant vallée, se décline avec ce suffixe dans les toponymes Nantilly, présents notamment sur la région à Saumur et à Esvres-sur-Indre (ruisseau de Nantilly).
Les toponymes Neuilly présentent le même suffixe (Neuilly-sur-Seine, Neuilly-Plaisance, Neuilly-en-Sancerre, Neuilly-en-Dun, etc.). Ils sont souvent présent sur des zones frontières des départements actuels, traces des anciennes frontières gauloises. Cette particularité est due au fait que le “ne” de Neuilly, signifie en gaulois la négation. Ces toponymes indiquent des lieux près de marécages, mais à l’écart de ces marais qui servaient habituellement de frontière naturelle défensive.
L’interprétation qui voudrait voir dans Neuilly, la racine « neuf, neuve, nouveau ou nouvelle » est à corriger.
On trouve les Neuilly, évidemment en bordure de baie de Somme, sur les frontières de la Normandie, entre la Touraine et le Poitou, sur la marche entre les pays de langue d’oil et les pays de langue d’oc où ce toponyme est presque absent, et aux frontières de l’ancien peuple gaulois des Eduens.
En Indre-et-Loire, le suffixe –illy est surtout présent sur la frontière, entre la Touraine, et le Poitou, sur la vallée de l’Indre, sur les terres argileuses de la Gâtine tourangelle, mais aussi au sein de la Touraine du Loir-et-Cher, ancienne frontière avec le pays gaulois des Carnutes.
Dans le Loiret, on peut remarquer la vallée du Loing, une forte concentration autour de l’ancien grande ville gauloise de Cenabum, Orléans, dans les marécages de Sologne comme en Loir-et-Cher, et en limite nord des sables de la forêt d’Orléans, prolongement géologique de la Sologne au Nord de la Loire.
Dans l’ancien pays des Bituriges, le Berry (départements du Cher, de l’Indre et partie de l’Allier), la répartition semble correspondre à un étalement défensif autour et à l’Est de la grand cité de Avaricum, Bourges, défenses faisant face aux Eduens, nation gauloise voisine.
Le “z” de Nouzilly
Entre le terme “noue” et le suffixe “-illy” existe le son “z” qui semble correspondre à un pluriel. Ce “z” rappelle le terme médiévale de “aze” qui désigne les mouches, les abeilles, les insectes, très présents dans les marais, leur lieu privilégié de reproduction.
Conclusion : Nouzilly, poésie gauloise proche de l’haïku japonais…
Percevoir l’haïku en question nous offre aujourd’hui un feu d’artifice sémantique gaulois pouvant poser et nous faire incarner une contemplation. Nouzilly signifie effectivement plusieurs choses à la fois : les noues, marécages (phonétiquement « nous », mais sans pluriel, avec un « e », « eux, « oeufs », etc.), le pluriel « z » avec sa présence d’insectes, son bourdonnement, ses moustiques des marais… (en pensant au terme médiéval « aze »), précédé d’un ou, où, faisant référence à quelque chose de difficilement perceptible, avec devant le « n », négation gauloise, et -illy, clairière humide, bassin, entrailles, fermentation, gaz de pets, méthane, pourriture, zone de défense et de défiance, avec en plus une évocation 3D d’une géomorphologie, etc.
Nous-y y ! Une libellule de ces marais d’ici est difficile à suivre des yeux pour nous aujourd’hui… Et une évocation gauloise telle que celle-ci ?
La Choisille, la Petite Choisille
D’après les toponymistes, ce nom serait en rapport avec un diminutif du latin caucellus, un vase à boire, une coupe, et serait en rapport avec les nombreux étangs qui ponctuent, grâce à leur digue de retenue, les chaussées, ces petits cours d’eau qui portent ici le même nom.
Charentay, son château XIXe siècle, son étang sur l’époustouflant alignement des fossés de César, auprès d’un mégalithe au moins cinq fois millénaire…
Incroyable et merveilleux, Nouzilly, ses randonnées, ses mégalithes, ses noms gaulois, ses fossés de César, ses mines gauloises, romaines, franques, ses étangs, ses ruisseaux, ses marais, son clocher incontournable…
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N’hésitez pas, osez l’Histoire !